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Mercredi, décembre 01st, 2010 | Author: Pierre

Pierre Carles était présent samedi 27 novembre au Toboggan pour la projection de son dernier documentaire critique sur la télévision, intitulé Fin de concession (2010). Ce film forme avec Pas vu, pas pris (1998) et Enfin pris (2002), une trilogie sur les accointances entre le pouvoir politique et le pouvoir médiatique de la télévision. Dans Fin de concession, Pierre Carles part d’un questionnement très pertinent à propos du renouvellement automatique de la concession de TF1 à Bouygues en 1997, alors que Philippe Léotard, ministre de la culture à l’époque de la privatisation de la chaîne, avait souligné son intention de faire que la concession de la chaîne ne soit pas renouvelée automatiquement, mais soit remise sur le marché de la concurrence, comme une “épée de Damoclès” (l’expression est de lui) pour obliger le propriétaire temporaire de TF1 à une forme d’excellence.

Sans doute, ce qui pousse Pierre Carles à soulever cette question aujourd’hui, question que l’ensemble des journalistes d’investigation ont omis d’aborder, c’est bien évidemment le constat de la détérioration de la qualité des programmes diffusés par la première chaîne. Et Pierre Carles rappelle, au travers d’image d’archives passionnantes, comment Bernard Tapie a “coaché” les partenaires de Bouygues à l’époque. Le n°1 du bâtiment était en concurrence sur ce dossier avec Hachette. On y voit par exemple une représentante du journal “Marie-Claire” apprendre le texte qu’elle récitera au CNCL pour les convaincre de la supériorité de leur dossier sur celui d’Hachette. Bernard Tapie orchestre la manière dont chaque intervenant devra se comporter, quelles intonations il devra prendre, tout ça sous le regard attentif de Francis Bouygues. Toute cette partie du documentaire est passionnante. Pierre Carles montre avec beaucoup de savoir-faire, la façon dont Bouygues a mesuré l’exceptionnelle opportunité qui se présentait à lui, et comment il s’est donné les moyens de la saisir.

Bien sûr, on mesure aussi avec le recul, que le groupe industriel était prêt à tout promettre pour obtenir cette concession et à n’importe quel prix, parce que, comme l’a affirmé Francis Bouygues lui-même, c’est une occasion qui ne se présente pas deux fois. Et il avait raison… Aujourd’hui on mesure néanmoins le fossé (c’est un euphémisme) qui s’est creusé entre le cahier des charges auquel Bouygues s’était engagé à répondre, et la programmation de la chaîne. Pierre Carles rappelle la fameuse phrase de Patrick Le Lay sur l’approche business du métier de TF1 qui consiste à vendre aux annonceurs publicitaires du “temps de cerveau humain disponible”.

Toute cette partie est passionnante et amusante à la fois. Pierre Carles se montre un journaliste d’investigation libre, pertinent et impertinent, il travaille sérieusement pour obtenir des réponses aux questions qu’il se pose, sans pour autant se prendre au sérieux. Il est également surprenant de voir qu’il suscite la sympathie de nombreux confrères très attachés à leur métier d’investigation, même si ceux-ci se méfient des démarches qu’il adopte, comme Elise Lucet par exemple. Et c’est sur ce point où l’enquête m’a finalement le moins convaincu. Redouté par la plupart des journalistes et des hommes de pouvoir bien installés dans leur profession, Pierre Carles peine à obtenir les rendez-vous qu’il souhaite. Bernard Tapie, Jacques Chancel ou Audrey Pulvar repoussent toutes ses tentatives d’approche. Et pour cause, Audrey Pulvar, compagne d’Arnaud Montebourg, filmé et piégé durant le film, tout en ayant apparemment de la sympathie pour la démarche de Pierre Carles et sans doute aussi une certaine admiration pour ses documentaires d’investigation précédents, se méfie de l’image qu’elle pourrait lui offrir et de ce qu’il en fera. Du coup le documentaire perd de sa pertinence parce que ces refus successifs n’accréditent pas forcément la thèse d’un amalgame entre pouvoir et journalisme, mais plutôt le reflet de volontés personnelles:

  • soit de réussir sa carrière ou au moins de ne pas l’infléchir dans un discrédit (Audrey Pulvar),
  • soit de passer une retraite tranquille (Jacques Chancel),
  • soit qu’on lui foute la paix parce que les procès il en a eu suffisamment (Bernard Tapie).

Ici j’ai regretté que Pierre Carles ne lorgne pas plus du côté des travaux de Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, d’autant que ces deux sociologues travaillent eux-aussi dans le sillage de Pierre Bourdieu, sociologue si proche de Pierre Carles.

Pierre Carles démystifie le pouvoir qu’elle qu’en soit les colorations. Il montre par exemple des images d’archives où l’on voit Jacques Chirac reprocher à François Mitterrand, sous le regard inquiet de Michèle Cotta, d’avoir nommé des hommes  et des femmes à tous les postes clés des médias français. Finalement, la dérive actuelle dans les médias français n’est que la continuation d’une longue histoire. La nouveauté nous disent les Pinçon-Charlot, provient du fait qu’aujourd’hui cette collusion s’affiche beaucoup plus ouvertement. Du coup, comme l’affiche de Fin de concession le montre, c’est plutôt les médias, et ici en l’occurrence TF1, qui regardent le petit Pierre Carles se débattre dans son enquête sans véritablement qu’il puisse nous livrer les clés de cette collusion.

Une affiche à limage du film

Une affiche à l'image du film

Malgré cette frustration dû à l’affaiblissement du questionnement si pertinent de Pierre Carles, affaiblissement dû sans doute aux options d’investigation qu’il a choisi, j’ai été très sensible tant à l’authenticité du documentaire, qu’à son esthétique. Pierre Carles se livre tout au long de cette enquête à de multiples autocritiques. Il livre aussi certains sentiments qui l’animent lorsqu’il avoue par exemple que son souhait consiste parfois à humilier certains protagonistes (ce qui n’est pas très glorieux, ni très pertinent), où lorsque sur le ton de la confession, il nous fait partager avec humour sa sensibilité aux charmes d’Elise Lucet ou Michèle Cotta. Où bien encore, lorsqu’il réalise une fausse interview de Jean-Marie Cavada, à la façon de PPDA, dans laquelle il dit une partie de ce que lui inspire le parcours du présentateur de La marche du siècle. Quant à l’esthétique du film, elle est très réussi parce qu’elle participe au sentiment de proximité que Pierre Carles m’a fait éprouvé: gros plan sur les mains, conversations au téléphone, etc… Pierre Carles invite en quelque sorte le spectateur dans son documentaire, et se faisant l’invite à poursuivre l’investigation.

Il avoue qu’il a tourné ce documentaire, non pas pour éduquer le spectateur, mais pour le bousculer et même parfois pour l’énerver. Quelqu’en soient les défauts, il est important de remercier ceux qui nous réveillent, même si, nous n’en partageons pas toujours les méthodes. Au final, on se sent plus lucide, et le film de Pierre Carles nous offre une qualité rare: le discernement.

Pierre Carles en pleine confrontation

Pierre Carles en pleine confrontation

Lundi, mars 29th, 2010 | Author: Pierre

Odile la rieuse est partie en 1985. Avec les fous-rires qu’elle a suscité, il était difficile de s’imaginer la voir partir si jeune. J’ai évoqué son livre, Moi Odile, la femme à Choron,  dans un précédent article, livre aujourd’hui oublié ayant pourtant suscité plusieurs commentaires, soit de ma famille ou d’amis, soit de journalistes qui préparaient un hommage à Michèle Bernier. Je viens de voir que cet hommage sera diffusé le 10 avril prochain dans l’émission “L’aventure inattendue” présentée par Patrick Sabatier.

Michèle Bernier, enfant

Michèle Bernier, enfant

Et puis Sylvia, la seconde compagne du professeur Choron, m’a écrit un commentaire pour exprimer une partie de la souffrance qui l’envahit depuis la disparition de son amour en janvier 2005. Aujourd’hui, alors que beaucoup de personnes se réclament de l’influence du professeur Choron, le rôle de Sylvia demeure ignoré. Elle a pourtant vécu 20 ans avec lui, en l’accompagnant dans sa tentative de poursuivre l’aventure du colportage de journaux libres et indépendants, affichant la dérision et la provocation. Mais les temps ont changé depuis les années 60 et 70. Sans doute est-il plus dur au cours des années 90 de faire vivre un journal comme La Mouise alors qu’en apparence il semblerait plus facile de nos jours d’exprimer librement toutes les opinions. Sans doute avons nous aussi intériorisé un contrôle plus important de nos pensées. En réalité nous ne sommes pas plus libres de nous exprimer parce qu’aujourd’hui nous sécrétons de l’inquiétude. Et je crois que cette émotion inhibe notre capacité à rire et à nous émerveiller pleinement.

Sylvia a accompagné fidèlement Choron jusqu’à sa dernière toilette pour laquelle, amoureusement, elle l’a habillé de son costume de scène comme en témoigne Delfeil de Ton dans son article “Un hors la loi grandiose” paru dans le Nouvel Observateur du 13 janvier 2005. Les mots de Delteil de Ton, encore tout humide des larmes qu’il a versé à la disparition d’un ami, d’un maître ou tout au moins d’un exemple, imprime toute l’admiration qu’il éprouvait pour ce professeur qui apprend à “désapprendre”: “Choron est né pauvre. Il est mort pauvre. Il a vécu comme un riche. Somptueux, généreux, honnête. Qu’ils aillent prétendre le contraire, les Mozarts qu’il a couvés, à qui il a donné des ailes. Vous connaissez beaucoup de patrons à qui il est arrivé d’habiter dans une cave pendant que ses anciens employés pétaient dans la soie et dans de beaux appartements?”. more…

Mercredi, février 10th, 2010 | Author: Pierre

Avec un peu de retard, voilà, pour les étudiants qui participaient au cours “Lectures de l’évènement”, le site que nous avions envisagé de mettre en ligne.

Comme c’était le cas pour la promo Itech, mis en ligne la semaine dernière, ce site est plus allégé que celui qui avait été prévu au départ et ce pour les mêmes raisons.

Merci à tous les étudiants qui s’y sont investis. Bon courage pour la suite de vos études…

Pour accéder au site, cliquez sur limage

Pour accéder au site, cliquez sur l'image

Mercredi, décembre 16th, 2009 | Author: Pierre

Les résultats du contrôle continu sont plutôt bons cette année, à l’image des étudiants de la promo. Vous vous répartissez quatre notes, les trois premières sont des évaluations individuelles et la dernière est collective:

  1. la présence/participation dont la moyenne est nettement plus élevée que les années précédentes avec une note de 16,02 (coefficient 1);
  2. vous avez également très bien réussi le premier QCM dont la moyenne générale était de 15,12 (coefficient 2);
  3. le second QCM a été plus difficile avec une moyenne de 10,4 (coefficient 2);
  4. enfin, vos exposés ont été au pire assez bien (12) et au mieux ils frisaient l’excellence (17) avec une moyenne de 14,24 (coefficient 5)

Félicitations pour vos efforts (la moyenne en contrôle continu est de 13,76). Merci pour vos retours et vos remarques critiques qui me permettent d’améliorer le cours d’année en année.

Le site de la promotion 2009 “Lectures de l’évènement” sera mis en ligne dans les prochaines semaines. Il sera annoncé par un article avec le lien pour s’y connecter.

Bonnes fêtes à toutes et à tous,  entourés des personnes qui vous sont chères.

Samedi, octobre 17th, 2009 | Author: Pierre

En vue de la table ronde qui nous réunira mardi 20 octobre à 18h30 place Carnot dans les locaux de l’université catholique, je vous soumet un court diaporama sur le thème de la vulnérabilité. Ce diaporama est illustré d’une musique intitulée Beatback interprété et composée par The Art Of Noise:

Enfin, une phrase d’un ami et d’un maître, Lama Cherab, enseignant et pratiquant de la voie du Bouddha: “L’invulnérabilité est destructible. La vulnérabilité est indestructible.”

Mercredi, octobre 14th, 2009 | Author: Pierre

Nous avons défini aujourd’hui les groupes pour les sujets d’exposé en lectures de l’évènement. En voici les dates et les répartitions:

  1. Quel est le rôle de la satire dans les médias? Valentin, Aymeric, Benoit et Thibaud le 4/11
  2. Faut-il vivre au rythme de l’information? Olivier, Pierre-Etienne, Lucie, Amélie et Alexandre le 18/11
  3. La politique est-elle la réponse aux changements qui s’imposent dans nos manières de vivre ensemble? Fabien, Pierre, Cédric et Anthony le 25/11
  4. Quelles sont les limites rencontrées par la liberté de la presse et des médias? Adrien, Damien, Valentin, Victor et Michel le 2/12
  5. En quoi François Bayrou a-t-il pu représenter une alternative? Est-on en train d’en vivre la fin? Florian, Alexandre, Tanguy et Romain le 9/12
  6. La grille de lecture de l’information par le paradigme de la complexité est-elle unilatérale? Lucie, Westley, Xavier et Julie le 16/12

Clément étant absent cette semaine, il lui restera à choisir son exposé, sachant que les sujets 2 et 4 sont complets. J’en profite également pour vous rappeler que toute absence non justifiée a une répercussion sur votre évaluation.

Le reportage sur lequel nous avons travaillé aujourd’hui s’intitule Images ennemies. Il a été réalisé en 2005 par Mark Daniels, un américain. Son point de vue critique en fait une belle entrée en matière pour notre cours.

Mercredi, octobre 14th, 2009 | Author: Pierre

Comme chaque année, tous les étudiants devront assister à la table ronde organisée par le département de formation humaine en vue de la préparation de l’examen final. Voici l’affiche de cette table-ronde:

Un échange qui intéresse professeur et étudiant en formation humaine

Un échange qui intéresse professeurs et étudiants en formation humaine

Mercredi, octobre 07th, 2009 | Author: Pierre

Nouveau millésime pour ce cours de “Lectures de l’évènement”… Bienvenu à chacune et chacun des étudiants qui ont choisi cette discipline.

Durant les neufs séances qui nous réunirons jusqu’au 16 décembre nous allons:

  • explorer l’actualité hebdomadaire,
  • analyser l’histoire et les discours médiatiques,
  • tenter de d’explorer les futurs possibles par un travail de prospectives,
  • et enfin nous rencontrerons des alternatives au fonctionnement du modèle dominant qui place le marché et la finance au coeur des régulations économiques et sociales.

Vous trouverez le discours inaugural destiné aux nouveaux étudiants en cliquant ici.

N’oubliez pas de réfléchir aux sujets que vous souhaitez traiter en exposé. Nous définirons les sujets, les groupes et les dates mercredi prochain.

Dimanche, août 02nd, 2009 | Author: Pierre

Et bien cette histoire a été écrite de manière très humoristique en 1983 par Odile Vaudelle (cf. l’article précédent), et quelques mois auparavant par François Cavanna dans Bêtes et méchants. Mais plus récemment, cette année d’ailleurs, Stéphane Mazurier a publié chez Buchet/chastel Bête, méchant et hebdomadaire. Une histoire de Charlie Hebdo, 1969-1982. Si vous êtes intéressé par le point de vue d’un historien engagé, un historien qui ne sent pas la poussière, un historien passionné et respectueux du travail assuré par la presse satirique en général et Charlie Hebdo en particulier, je vous conseille d’écouter sa conférence en deux parties d’un quart d’heure environ.

Lamitié qui unit nos deux compères est magnifiquement représentée sur cette photo

L'amitié qui unit nos deux compères est magnifiquement représentée sur cette photo

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Samedi, août 01st, 2009 | Author: Pierre

Une des raisons pour lesquelles, à coté de mes activités d’enseignement, j’apprécie de travailler dans les livres d’occasion, c’est que nos lectures ne sont pas conditionnées uniquement par l’actualité éditoriale. La contingence des rencontres prime, dans mon cas c’est même « haut la main ». Par exemple, hier matin, rien ne laissait présager que j’allais rencontrer Odile, de son nom Vaudelle. Odile fut la femme du professeur Choron, alias Georges Bernier.

Odile a publié un livre deux ans avant sa mort prématurée en 1985 (elle n’avait que 51 ans) intitulé Moi, Odile, la femme à Choron. La petite histoire d’Hara-Kiri et Charlie-Hebdo chez Mengès. Un livre incroyable tissé de centaines d’anecdotes plus drôles les unes que les autres. more…