Lettre ouverte à Christophe Delbrouck

Malataverne, Drôme, la semaine du 23 au 27 juillet 2007

Christophe,

une appréhension certaine m’étreint alors que je presse les touches de ce clavier. T’exprimer sincèrement une partie des émotions et de la compréhension de l’œuvre et de la personnalité de Frank Zappa que ta trilogie m’a permis d’aborder, n’est en effet pas une mince affaire.

Tout d’abord, comme l’univers de Frank, tes livres sont d’une immense richesse, richesse documentaire alimentée par une écoute amoureuse et intelligente de son oeuvre. Très vite je me suis rendu à l’évidence, ton travail est gigantesque et tes 1200 pages sont en réalité la synthèse d’une fréquentation assidue de sa musique depuis quelques dizaines d’années (?), fréquentation qui aurait sans doute pu donner lieu à un travail encore plus important si les contraintes éditoriales n’étaient pas présentes. Je ne connais personne dans mon entourage qui n’ait aimé la musique de Frank aussi intensément que moi, beaucoup ont une réelle estime pour son travail, mais bien peu me semblent connaître une intime étreinte avec lui. Avant d’entrer plus en détail et de mettre en forme mes souvenirs de lecture, achevée la semaine dernière, la reconnaissance de cette étreinte dans ton travail est la première manifestation de la joie qui m’a intensément habitée lorsque, dès que je pouvais me rendre disponible, je dévorais les pages de tes livres. Dévorer n’est d’ailleurs pas tout à fait exact, cela semble induire une gloutonnerie faisant fi de la qualité de tes livres, il s’agissait davantage d’une avidité fortement teintée de respect. Il m’est en effet arrivé à plusieurs reprises de renoncer à avancer davantage ma lecture parce que je ne pouvais pas m’y plonger aussi sereinement que je l’aurais souhaité. Entre fin juin et fin juillet, j’ai ainsi été suspendu à la lecture de ton œuvre, dont j’ai lu qu’il n’existe pas d’équivalent dans d’autres langues, même en anglais. Cela rend ton travail encore plus précieux.

J’avais 18 ans lorsque j’ai découvert l’univers de Frank Zappa. Contrairement à toi, l’album fut acheté… À Carrefour qui plus est ! Guitar venait de paraître. Je m’intéressais beaucoup aux musiques différentes de celles que nous proposaient le Top 50 et les médias. Je n’avais pas entendu parler de Frank Zappa à l’époque, enfin je crois. En revanche ce dont je suis sûr, c’est de la forte impression que produisit sur moi le visage concentré de Frank sur sa guitare. Il la regardait amoureusement, comme un violoniste ou un pianiste virtuoses auraient pu aborder leur instrument. Mais là il s’agissait d’une guitare électrique, le même instrument que celui d’AC/DC ou de Trust. Serait-il possible que la guitare électrique ait ses lettres de noblesse ? Pourquoi pas ? J’ai toujours été un tantinet idéaliste. À l’écoute du disque, quelle ne fut pas ma déception ! C’était inaudible, « où sont les refrains » me demandais-je ? « N’y a-t-il aucune mélodie susceptible de retenir mon attention ? » Non ! Au troisième morceau du vinyle, j’abandonnais, dégoûté… Ce double album m’avait coûté 99 francs. Une vraie somme quand on a 18 ans ! Pourtant son visage et cet album demeureront plusieurs mois sur mon bureau, comme un objet étrange et magique dont, pour l’instant, je n’avais pas les clefs. Seuls demeuraient la beauté du visage de Frank tout absorbé dans l’exécution de sa musique et l’inexplicable attrait qu’exerçait sur moi cet album. Tout semblait mystérieux : pourquoi un musicien préconisait de s’inscrire sur les listes électorales ? Quel rapport pouvait-il exister entre les enfants et les républicains pour qui ce disque est déconseillé ? L’humour était palpable mais pas son sens. Pourtant sans que je le sache encore, je venais de rencontrer l’homme qui serait déterminant dans mon futur. Un exemple de liberté et de créativité, affranchi de nombreuses règles sociales arbitraires, portant un regard profondément original sur le monde. Depuis cette époque, Frank chemine à mes cotés, il inspire mes choix et féconde mes errances. Un maître qui finalement ne me dit rien d’autre que : « soit toujours fidèle à toi-même ».

J’avais acquis le premier tome de ta trilogie lors de sa parution. Sachant que deux autres étaient encore à venir, j’ai conservé ton livre soigneusement à côté de celui de Dominique Chevalier, Viva Zappa, que je m’étais procuré à la FNAC en 96. Il en est des œuvres en plusieurs tomes comme des séries BD (par exemple les deux magnifiques séries des mondes d’Aldébaran de Léo), je ne puis me résoudre à suivre l’auteur dans sa phase de création. Pour m’y intéresser, j’ai besoin d’avoir l’intégralité de son travail. Ta trilogie n’a pas échappé à cette règle. Les deux premiers tomes ont été acquis, dormant dans un coin de ma bibliothèque en attendant la venue de leur cadet. Ce fut chose faite en mai dernier. Le premier tome, Frank Zappa et les mères de l’invention, est une belle édition, reliure cousue collée, le nec plus ultra, il traversera le temps plus sûrement que les deux autres tomes. Frank Zappa et la dînette de chrome et Frank Zappa et l’Amérique parfaite, seulement collés, ne supporteront pas plus de trois lectures… Après, des feuillets se détacheront, sauf si les lecteurs prennent grand soin d’eux. Les jaquettes de Solé sont magnifiques, surtout celle du premier tome, qui résume le génie iconoclaste et l’imagination fertile de Frank. Fin mai donc, je contemple enfin l’ensemble des volumes de ta trilogie.
Depuis plusieurs années j’attendais l’achèvement de ton travail, je l’aborde comme Le seigneur des anneaux, en ayant à l’esprit que cette lecture sera à double tranchant. Une grande œuvre ne supporte pas les demi-mesures, comme l’œuvre de Tolkien mérite un lecteur entièrement absorbé dans son écriture, présent au style de la narration, alerte aux vicissitudes de l’histoire, l’œuvre de Frank, encore à bien des égards hermétiques, supportera t-elle d’être ainsi démystifiée ? J’ai déjà tellement lu de commentaires sur son œuvre, avec parfois des contradictions, parfois aussi, sous couvert d’une assurance déplacée, des inepties. Frank lui-même écrit au début de son livre qu’il se méfie des livres qui lui sont consacrés. Cette attitude méfiante, tu la décodes avec une amoureuse lucidité, sans complaisance pour Frank, dans le troisième volume. Comme s’il avait en partie succombé lui-même au délire paranoïaque de cette Amérique, modèle pour le monde, volontairement aveugle à ses propres contradictions.
D’autant que je me souvienne, cette question de la légitimité d’une démystification s’est transformée d’elle-même en une lecture assidue, ponctuée d’écoutes renouvelées des œuvres de Frank. La nouveauté ici, c’est bien toi qui l’a inspirée Christophe, tes textes décrivent si bien l’écoute de tes oreilles ! Bien sûr il devient évident lorsque je te lis que tu ne te contentes pas seulement d’écouter la musique de Frank, mais aussi que tu l’interprètes. Le Nasal Retentive Orchestra m’avait fortement impressionné lorsque je l’avais découvert, cela remonte maintenant à cinq ou six ans. Quelques éléments de théorie musicale ornent les commentaires sur les chansons et les albums de Frank. Et comme sa culture musicale était immense, alimentée par une curiosité abyssale, tes commentaires épousent les multiples références qu’il est possible de repérer dans la musique zappaienne. Varèse, Nancarrow et Stravinsky sont régulièrement cités, ils sont incontournables. Mais d’autres références plus subtiles apparaissent aussi, de multiples œuvres qui me sont bien souvent inconnues, elles émergent au gré du texte, comme autant de manifestations issues de l’univers de Frank, mise à jour par ta méticuleuse exégèse. Ces nouvelles références ont enrichi mes explorations musicales pour plusieurs décennies. J’ai lentement réalisé au fil des années que l’œuvre de Frank était comme une merveilleuse interface capable de me mettre en relation avec toutes les musiques. Ta trilogie conforte davantage cette intuition, en lui offrant une immense envergure.
Cette envergure s’applique en retour directement à l’œuvre de Frank. « Tiens voilà un morceau que jamais je n’avais entendu ainsi » ne cessais-je de me répéter. Conjuguant harmonieusement lecture et écoute, ce que tes livres m’ont amené, ce n’est rien moins qu’une complète redécouverte de l’intégralité de l’œuvre de Frank, vingt ans après ma première rencontre avec elle. Aux dix années de découvertes incessantes, ont succédé dix autres années de réécoutes hasardeuses, au gré de mes envies, suivant la logique chaotique de ma curiosité, explorant aussi les musiciens qui se risquent à l’interprétation de son répertoire. Ce que ta trilogie m’a d’abord offert, c’est une sorte de catalogue raisonné de l’œuvre zappaienne.
Catalogue raisonné dans le sens où, me semble-t-il, tu ne négliges aucune des facettes du travail de Frank. Ton écriture, contrairement à ton autre livre Frank Zappa : chronique discographique, ne suit pas principalement la sortie des albums. Elle plonge davantage dans l’élaboration de l’œuvre en suivant plutôt le rythme des tournées et les phases de composition. Mon grand regret reste de ne jamais avoir pu assister à l’un des concerts de Frank. Tu peux donc imaginer quelle joie ton livre a pu me procurer. Des débuts jusqu’à la dernière tournée en 88 (bien tristement conclu, je ne le savais pas !), j’ai pu me sentir par procuration, au plus près du quotidien de Frank. Comprendre ainsi beaucoup mieux où il puisait son inspiration. Et de nouveau, au risque de me répéter, il est difficile de ne pas rendre hommage à ton travail documentaire. La plupart des concerts sont répertoriés sans que le style n’en soit alourdi. Mille détails agrémentent ces tournées, qui sont le plus souvent la matière première qui alimente la créativité débordante de Frank. Ton méticuleux travail de reconstitution de la vie en tournée (des auditions aux répétitions et aux concerts) ouvre les portes du labyrinthe de l’univers artistique de Frank. De nombreux traits de sa personnalité au travail sont passés en revue : sa complaisance à l’égard des errances sexuelles de ses musiciens et de leurs groupies, son intolérance à l’égard des erreurs de ses musiciens sur scène (j’ai appris avec stupéfaction qu’il lui arrivait d’arrêter l’exécution d’une composition pour désigner en direct sur scène le musicien fautif), sa capacité à composer n’importe où (dans un aéroport, à l’hôtel, etc…)…
Dans chacun des volumes de ton livre, les musiciens de Frank ont toujours droit à la parole, même lorsqu’il s’agit de critiquer les choix de Frank, ou ses comportements à leur égard. Chaque musicien suffisamment important est introduit, avec une brève biographie pour le présenter. Cela permet au lecteur de mesurer toute l’importance de sa personnalité, ses capacités et ses acquis. Chaque auditeur de l’œuvre de Frank, quelle que soit la période envisagée, ne peut qu’apprécier le talent des interprètes, talents réellement palpables sur les lives et l’incroyable série You Can’t Do That On Stage Anymore. Les éclairages que tu apportes sont donc précieux. Hormis dans l’œuvre zappaienne, il n’est pas toujours aisé de suivre ces musiciens lorsqu’ils quittent l’orchestre. Or tu prends soin tout au long de ton livre d’indiquer d’où ils viennent et très souvent tu donnes des indications sur ce qu’ils ont fait après leur passage chez Frank. Tu réponds aussi à de nombreuses interrogations qui peuvent animer les auditeurs de l’œuvre de Frank. Une question était ainsi longtemps restée sans réponse à propos de l’interruption de la collaboration entre Frank et Jean-Luc Ponty. Tu y réponds très clairement en donnant les raisons (financières) de cette rupture, que Jean-Luc Ponty mettra apparemment beaucoup de temps à reconnaître. J’étais également très désireux de mieux connaître les relations que Frank avait entretenues avec Shankar, autre violoniste très doué. Là encore tu donnes sur cette collaboration des informations, rares mais précieuses.

Dès le départ avec les Mothers, on comprend en te lisant que Frank s’est comporté comme un leader tant sur le plan artistique que sur le plan financier. J’ai ainsi appris qu’après les concerts des Mothers, il s’isolait, ne partageant pas les délires de ses musiciens. Il était déjà tout à ses compositions, ne se rendant disponible qu’à sa créativité, entièrement au service de sa musique et des commentaires sociaux que lui inspirait son environnement. Cette dernière partie de l’œuvre de Frank est particulièrement difficile à aborder pour un néophyte. Autant la musique peut être appréciée sans aucune culture musicale particulière, autant ses commentaires sociaux et politiques demeurent obscurs. Il m’est rapidement apparu que le message social de Frank déborde largement les frontières nord-américaines. Sa position politique est très proche du généreux Coluche en France : même lucidité, même dérision, même capacité à faire fi des difficultés et à se lancer à corps perdu dans la défense des droits civiques et de ceux des minorités. Pourtant, passée cette première impression, il est bien difficile de comprendre précisément à qui Frank réserve ses attaques. À la bêtise certes, mais investie par qui, dans quel contexte ? Difficile d’en savoir plus ! Ses chansons sont en argots américains ! Le contexte social et politique américain est si différent de celui que nous connaissons en France, tout rapprochement ne peut qu’être hasardeux. Ici, tes livres ont été, encore une fois, un précieux guide dans la redécouverte de l’œuvre de Frank, mis à part les attaques à l’encontre des télévangélistes que j’avais rencontrées sur You Are What You Is et sur les cinq CD de la tournée de 88 (surtout Broadway The Hard Way), je n’en connaissais pas tellement plus. La vive réaction de Frank à l’encontre du mouvement attaquant la pornographie initié par l’épouse d’Al Gore (bien visible sur Frank Zappa Meets The Mothers Of Prevention), ses critiques à l’égard de Reagan dès les années 60, la figure emblématique de Lenny Bruce, bref des pans entiers de ses positions politiques et sociales m’étaient tout simplement inconnus.
Depuis une dizaine d’années, le département de l’université catholique de Lyon me charge d’animer des cours pour certaines écoles d’ingénieur (CPE, Itech et Ecam). Ayant une formation de recherche en histoire de la pensée économique, les deux principaux cours sur lesquels je travaille s’intitulent « Economie citoyenne » et « Lecture de l’événement ». Puisqu’il s’agit de formations aux sciences humaines, l’ouverture et l’implication des étudiants sont des ingrédients fondamentaux du cours. Les arts et les discussions politiques ont leur place à part entière à côté des théories économiques, des réflexions épistémologiques, éthiques et écologiques. Je n’ai pas encore pu véritablement intégrer Frank au cours. Le travail de Pacôme Thiellement, Economie esquimo : le rêve de Zappa, m’y avait un peu incité. Ta trilogie vient renforcer cette incitation. Elle illustre parfaitement le rôle exemplaire de Frank en tant que citoyen. Citoyen américain d’abord, mais aussi citoyen du monde avec ses positions écologiques, et d’une manière plus générale, son attitude sociale, où l’ironie et l’humour sont toujours au service d’une lucidité et d’une générosité visant à faire partager sa compréhension politique et sociale du monde. Frank semble avoir été un libéral (au sens philosophique), attaché à réduire l’intervention de l’Etat et à laisser à l’individu le maximum d’initiatives. Pourtant il semble aussi qu’il ait été partisan d’un Etat fort, dans le sens où, aussi réduit soit-il, il demeure seul maître dans son domaine de compétence. Peut-être est-ce en ce sens qu’il lui est arrivé de se qualifier de conservateur ? Tes livres m’incitent donc à intégrer Frank au cours, au même titre que les autres figures emblématiques d’une citoyenneté engagée dans la lutte non-violente pour défendre le droit des minorités : David-Henry Thoreau et Martin Luther King aux Etats-Unis, Romain Rolland en France, Gandhi en Inde, ou Tenzin Gyatso au Tibet. Comme Coluche, il a sa place dans cette citoyenneté particulière qui consiste à lutter contre la barbarie grâce à la dérision. Loin d’une lutte dérisoire, cette forme de citoyenneté fut illustrée par Albert Cossery dans son irrésistible roman La violence et la dérision, où il montre toute la pertinence de cette attitude citoyenne, et aussi toute l’ingéniosité qu’elle requiert.

Un autre aspect de ta trilogie m’a énormément touché. Tu as la capacité de demeurer tout à la fois critique et respectueux de l’œuvre de Frank. Certains commentateurs endossent, plus ou moins volontairement, la tenue de Frank, imitant son sens de l’humour ou ses critiques provocantes, et ils y appliquent parfois l’œuvre de Frank, avec une liberté de ton oublieuse de l’incroyable rigueur à laquelle Frank se soumettait. À aucun moment je n’ai ressenti cette dérive dans tes livres. Et pourtant tu n’en es pas moins critique, parfois à l’égard de Frank (son attitude à l’encontre des Grand-Mothers par exemple, à qui il rendait bien difficile l’interprétation de ses premières œuvres), plus rarement à l’égard de sa musique (sa collaboration sur l’album de Shankar Touch me there). Mais à aucun moment, tes critiques ne prennent la trajectoire d’un dérapage incontrôlé, elles m’ont davantage donné l’impression d’exprimer un regret que l’exigence de lucidité ne peut taire. Il est si difficile de ne pas être un fan inconditionnel ! En même temps, il est si facile de se laisser aller à simplement exprimer ses préférences sans le souci d’une écoute authentique. Frank n’était pas parfait, il est salutaire d’en être conscient. Il me semble d’ailleurs que ce n’est pas pour une hypothétique perfection que des millions de personnes affichent autant de respect pour lui et pour son œuvre. Sans doute reconnaissent-ils son incroyable authenticité. Il me semble que la générosité de Frank s’est toujours appliquée au partage de cette authenticité. Le souci d’une transparence toujours travaillée, quelles que soient les formes complexes qu’ait pu revêtir son œuvre, traverse sa production depuis ses origines jusqu’à son achèvement. Cette lecture critique de l’œuvre de Frank donne d’ailleurs une épaisseur à laquelle ta trilogie n’aurait pu prétendre sans elle. Toujours respectueuse, ton approche n’est jamais fusionnelle. Elle épouse l’œuvre sans renoncer à sa personnalité. Elle invite aussi le lecteur à adopter la même approche, en explorant lui-même les multiples chemins que lui offre la soixantaine d’albums de Frank.
Gigantesque production discographique sur laquelle tu te plonges en détaillant chaque album depuis Freak Out jusqu’à Civilisation Phase III, soit 27 années écoulées. Multiple, multiforme, cette œuvre pourrait supporter plusieurs commentateurs sans pour autant s’en trouver épuisée. Or il se trouve que tu en regroupes plusieurs en une seule personne. En effet, les commentaires que tu développais déjà largement dans ta chronique discographique en 1994, sont ici complètement renouvelés. D’abord dans leur forme bien sûr, puisqu’ils s’intègrent dans un corpus plus large. Cependant cette nouveauté s’applique aussi au fond, non point que l’inspiration ait changé, mais les analyses que tu développes sont différentes. De nouveaux éléments de théorie musicale sont avancés qui émanent de citations (de Frank ou d’autres musiciens) ou de tes propres réflexions. De nouvelles références à d’autres œuvres musicales émergent aussi au fil du texte. Beaucoup d’anecdotes sur la genèse des albums apparaissent également. Au final, la chronique discographique et la trilogie sont tout simplement deux ouvrages complémentaires qui ne se juxtaposent pratiquement jamais. Ils témoignent de l’approfondissement, ou plutôt de la maturation, de ton approche très personnelle (ayant pourtant un caractère universel) de l’œuvre de Frank.
Il ne me reste qu’un regret, celui d’avoir fini ta trilogie la semaine dernière. Elle ne dormira pourtant plus dans ma bibliothèque, comme elle l’a fait plusieurs années avant son achèvement. Maintenant qu’elle a été entièrement lue, elle sera consultée comme un ouvrage de référence incontournable. Comme je te l’ai écrit, ne serait-ce que sur les références musicales (œuvres et compositeurs) qui émaillent le texte de tes livres, il me faudra plusieurs années pour les explorer et les découvrir. Si je formulais librement mes souhaits, je serais en tant que lecteur (ou même en tant que collaborateur, dans la mesure de mes capacités) ravi de lire un ouvrage sur les reprises de l’œuvre de Frank. Elles se sont multipliées depuis sa mort, et il me semble qu’on y côtoie souvent des musiciens inspirés. Il m’est déjà très agréable de lire sur ton site les commentaires, souvent très critiques, que tu formules à l’égard l’édition des archives de Frank, dont le choix ne semble pas toujours très judicieux.
Il me reste donc à t’exprimer simplement la reconnaissance d’un autre amoureux de la musique de Frank Zappa, ayant eu le bonheur de vibrer de concert avec tes livres, émerveillé par toutes les découvertes que tu lui as offertes, et toujours désireux d’en lire davantage.

Cordialement,

Pierre

Premier tome d'une incroyable trilogie

Delbrouck (Christophe), 2003, Frank Zappa et les mères de l’invention, Le Castor Astral, 9782859205294, 24€.

idem

Delbrouck (Christophe), 2005, Frank Zappa et la dînette de chrome, Le Castor Astral, 9782859206048, 24€.

encore idem

Delbrouck (Christophe), 2006, Frank Zappa et l’Amérique parfaite, Le Castor Astral, 9782859206383, 24€.