Pierre Teilhard de Chardin 1881-1955

Le texte suivant est une synthèse du livre de Nicolas Corte intitulé La vie et l’âme de Teilhard de Chardin publié dans la collection “Le livre de poche chrétien” en 1957.

1/ Enfance et adolescence :

Pierre Teilhard de Chardin est né le 1er mai 1881 à Sarcenat (commune d’Orcines) dans le Puy-de-Dôme. Il semble que ce soit son père qui lui ait communiqué le goût des sciences naturelles.

Pierre Teilhard de Chardin a fait une partie de ses études au Lycée jésuite de Mongré à Villefranche-sur-Saône, puis à Aix-en-Provence entre 1899 et 1901, quelques années avant qu’Albert Schatz (l’économiste sur qui j’ai effectué mon premier travail de recherche) ne soit nommé professeur dans cette université. C’est à cette période qu’il entre de lui-même dans la Compagnie de Jésus à Aix puis à Laval.

2/ Premiers travaux, premiers écrits :

Son premier article publié en 1909 dans les Études s’intitule “Les miracles de Lourdes et les enquêtes canoniques”. Je ne retiendrai qu’une remarque de cet article, c’est la critique que Teilhard adresse à l’attitude des scientifiques lorsqu’ils observent dans les faits, des phénomènes incompréhensibles. Corte écrit à ce sujet, qu’il “oppose[…] l’empressement des savants à observer, classer étiqueter les faits, quand ils sont aptes à entrer dans leurs catégories établies, à leur négligence, à leurs hésitations, à leur mauvaise humeur trop visible, quand ils se trouvent en face de faits qui se “réclament de la prière, de la foi, en un mot du “surnaturel”” (p. 35).

En 1911, il est ordonné prêtre, et l’année suivante, il entre au laboratoire de Marcellin Boulle, au Muséeum d’histoire naturelle. C’est celui-ci qui l’initiera à la paléontologie humaine.

Je suis frappé par une remarque rapportée par un de ses camarades sur le front durant la Grande guerre. Teilhard était infirmier et brancardier. Il fut largement décoré pour son attitude courageuse. Corte le décrit comme un être calme et tranquille qui se déplaçait avec assurance malgré les bombardements. Aussi, ce camarade l’interrogea sur son attitude : “Comment faites-vous pour garder cette sérénité dans la bataille ? On croirait que vous ne voyez pas le danger, et que la peur ne peut vous atteindre. Il me répondit […] : Si je suis tué, je changerai d’état, voilà tout !” (pp. 41-42).

En 1918 il prononce ses vœux solennels à Lyon.

Teilhard reprend des études scientifiques à la Sorbonne et publie sa thèse de paléontologie, Les mammifères de l’Eocène inférieur en 1922. Il devient professeur adjoint de géologie. Il enseigne la paléontologie et la géologie à l’Institut catholique de Paris. Il adopte avec assurance les thèses sur l’Évolution, avec une position originale dans l’avenir. Il croit au pouvoir explicatif de ce terme. Dans sa thèse, il remarque d’ailleurs que la persistance des espèces est toujours obtenue dans le sens d’un plus large développement du cerveau. À cette époque, Teilhard est très ami avec Édouard Le Roy qui publia l’Exigence idéaliste et le fait de l’Évolution en 1927, et Les origines humaines et l’évolution de l’intelligence (1928). Teilhard fait une synthèse de leurs discussions dans son article de 1923 paru dans la Revue de Philosophie, “La paléontologie et l’apparition de l’homme”. Il écrit que “le secret de l’homme […] est dans la nature spirituelle de l’âme. Or, cette âme, toute de synthèse en son activité, échappe à la Science, dont l’essence est d’analyser les choses en leurs éléments et leurs antécédents matériels. Seuls le sens intime et la réflexion philosophique peuvent la découvrir” (p. 53).

C’est également à cette époque qu’il vit des expériences mystiques qui enrichisssent sa vie spirituelle et scientifique.

3/ En Chine : (1923-1945)

Le 11 mai 1923 à bord du bateau qui le mène en Chine, il écrit : “C’est la masse immense des puissances humaines indisciplinées qui me submerge” (p. 59). Il sait également qu’il diverge de façon fondamentale avec certains esprits sur la question : “Vaut-il mieux être ou ne pas être ?”, et il conclut que ces options sont indémontrables mais que si l’on choisit la première, il est difficile de s’arrêter sans aller jusqu’à Dieu. Le 23 octobre 1923, il écrit “plus je vais dans la vie, plus il me semble que les événements individuels ne doivent pas compter, mais seulement le dévouement à ce qui se fait de plus grand que nous. […] Le monde n’est intéressant qu’en avant ; mais regardé de ce côté, il est passionnant” (pp. 67-68).

De 1926 à 1937, Teilhard de Chardin écrit de nombreux ouvrages non publié : Le milieu divin (nov. 1926), L’esprit de la terre (1931), Comment je crois (1934), Esquisse de l’univers personnel (1936), Quelques réflexions sur la conversion du monde (1936), Sauvons l’humanité (1936), L’énergie humaine (1937).

4/ Vers la découverte du Sinanthrope (homme paléolithique de Pékin) :

Corte note une phrase qui l’embarrasse dans une lettre du 4 juillet 1927, et qui pour ma part me réjouit : “est-ce que l’esprit n’anime pas tout, même les plantes, même les pierres” (p. 84). C’est sur l’esprit des pierres que Corte fait une remarque, il se propose de donner une explication ultérieurement. Dans une lettre du 7 août 1927, Teilhard note : “je me sens résolu à me déclarer “croyant” en l’avenir du Monde, malgré les apparences, malgré une fausse orthodoxie qui confond progrès et matérialisme, changement et libéralisme, perfectionnement humain et naturalisme” (p. 85).

Sur le paquebot qui le mène en Chine, Teilhard écrit à nouveau sur une question qui traverse toutes ses œuvres : l’apparente dualité entre l’Esprit et la Matière. “L’Esprit que je crois voir est chargé des dépouilles de la Matière. […] La “plus grande conscience” a remplacé pour moi “l’Entropie”, dans sa valeur de fonction physique essentielle du Cosmos. Le Monde, si j’ose dire, me paraît “tomber” en avant et en haut sur le spirituel et cette inversion de la Cosmogonie a pour conséquence de donner une consistance cosmique aux centres de conscience, aux monades, le trésor individuel des âmes est impérissable et le Centre suprême doit être aimable et aimant” (pp. 87-88). Ce qui pousse Teilhard a retourné en Chine après son absence sur les lieux en décembre 1928, c’est la découverte du Sinanthrope qui confirme une de ses intuitions : “la vibration mystique est inséparable de la vibration scientifique et demande également à se manifester” (p. 88).

Il écrit le 16 septembre 1929 ce qui plus tard formera un ensemble plus vaste intitulé Esquisse de l’univers personnel (1936) : “la Science est entraînée désormais, en particulier depuis que la notion d’Évolution et de Durée a envahi jusqu’à la physique de la Matière, à construire sur l’Esprit ses explications du monde expérimental. […] Prise de biais, il me semble que l’immortalité de l’âme et de la Personnalité (Hyper-personnalité de Dieu) perdent leur apparence de vérités intéressées ou anthropomorphiques, et prennent une signification essentielle dans la structure du Monde” (p. 90).

Dans un article paru dans la revue des questions scientifiques du 20 juillet 1930, il écrit que la découverte du Sinanthrope “représente une sérieuse “manche” gagnée par les tenants de l’extension du Transformisme à la forme zoologique humaine” (p. 92).

5/ L’expert international de préhistoire :

À la mort du docteur Black, directeur des fouilles de Chou-Kou-Tien en Chine, Teilhard devient directeur du projet. Il écrit : “Quelle chose absurde, en apparence, que la vie […] Tellement absurde qu’on se sent rejeté sur une foi opiniâtre et désespérée en la réalité et les survivances de l’esprit. Autrement (s’il n’y a pas d’esprit, veux-je dire), il faudrait être des imbéciles pour ne pas faire grève à l’effort humain” (p. 109).

Teilhard écrit Le Milieu divin en 1926-1927. Il avait alors reçu de Louvain et de la faculté de théologie de Lyon de chaleureux éloges, mais toujours aucune réponse de Rome pour l’imprimatur. Il rédige également en 1931 l’Esprit de la terre qui lui aussi “circule sous le manteau”. Monseigneur Bruno de Solanges, recteur de l’Institut catholique de Toulouse s’intéresse aux idées de Teilhard. C’est lui qui demande à Teilhard la rédaction de Comment je crois. De même à Lyon, le père Auguste Valensin le suit attentivement. La lenteur de Rome ne l’étonne pas, il écrit : “Il faut arriver à conserver le goût substantiel de la vie et de l’action, tout en renonçant définitivement à être heureux pour soi-même. Là est le secret et non l’illusion du milieu divin” (p. 114). Cependant Teilhard garde la foi : “Je ne vois toujours que la même issue : aller toujours de l’avant, en croyant de plus en plus. Que le seigneur me garde seulement le goût passionné du Monde, une grande douceur, et m’aide à être jusqu’au bout pleinement humain” (p. 115).

Il écrit dans les Études en novembre 1935 un article sur “la découverte du passé”. Il écrit : “le passé m’a révélé la construction de l’avenir. […] Maintenant que la découverte fondamentale est faite, […] à savoir que nous sommes portés par une onde marchante de conscience, que reste-t-il d’important à trouver derrière nous ? Peut-être certains rythmes ou ressorts” (p. 117).

Ses voyages à l’étranger le rendent sceptique fasse à l’internationalisme et l’égalitarisme : “Plus je roule à l’étranger […] plus je crains que […] nombre de catholiques libéraux et plus particulièrement mes confrères les “Missiologues” ne fassent une lourde erreur en admettant, contre toute Biologie, l’égalité des races. Universalisme n’est pas démocratie (=égalitarisme)” (pp. 118-119).

En 1935-1936, il réalise ce qu’il considère être des découvertes fondamentales pour la compréhension de la préhistoire de l’Inde. C’est à cette période qu’il écrit : “Je crois bien que jamais ma vocation ne m’est apparue plus dépouillée ni plus claire : personnaliser le Monde en Dieu” (p. 121). C’est l’objet de son essai de 1936 : Esquisse d’un Univers personnel. Il examine successivement “la signification de la Personne dans la sur-Humanité, la consommation de la Personne en Dieu, l’énergie de Personnalisation par Amour, le sens cosmique et le sens humain, la religion de la Personne, réalisée dans le christianisme” (p. 121). Teilhard semble mûr pour la rédaction du phénomène humain qui a lieu à Pékin entre juin 1938 et juin 1940 avec une annexe rédigée à Rome le 28 octobre 1948.

En mai-juin 1936, alors que la guerre entre Chinois et Japonais débute, Teilhard écrit : “Je suis excédé par l’agitation humaine d’aujourd’hui […]. Fascisme, communisme, démocratie ne signifient plus rien […]. Je rêverais de voir le meilleur de l’Humanité se regrouper sur un esprit défini par les trois directions suivantes : Universalisme, Futurisme, Personnalisme, et se rallier au mouvement politique, économique qui se montrera techniquement le plus capable de sauver ces trois conditions. Il y a vraiment quelque chose à dire là-dessus. Je le sens et je le sais” (pp. 124-125).

Il rédige des essais Sauvons l’Humanité publiés dans les Études du 20 octobre 1937, intitulé “La crise présente”. Le 23 février 1938 il écrit : “Il me semble plus important de créer une nouvelle conception de l’activité humaine que de s’embarquer dans la fièvre captieuse d’une poussée politique qui a déjà ses chefs et trouvera toujours ses fidèles” (p. 127).

6/ Son message : le phénomène humain

En 1946, il quitte définitivement la Chine pour Paris où il rédige Le phénomène humain. Rome lui interdit d’accepter la chaire de paléontologie que lui propose de créer le Collège de France. Teilhard demeure fidèle à ses engagements auprès de l’Église.

Il faut souligner ce que Teilhard note dans son avertissement. Son but n’est pas de rédiger un essai de métaphysique ou de théologie, Le phénomène humain est pour lui un mémoire scientifique. Pour Corte, Teilhard reprend à son compte une partie de l’idée de l’homme-microcosme, reflet et abrégé de l’univers. “L’Homme est le fleuron suprême de la Vie, et la Vie est épanouie au sein même de l’Univers” (p. 130).

Pascal avait distingué trois ordres (la matière, la pensée et la vie surnaturelle), Péguy cinq règnes (le règne minéral, le règne végétal, le règne animal, le règne humain et le règne chrétien), Teilhard propose une continuité ponctuée par deux seuils : la Vie et la Pensée. Cette continuité s’ouvre sur la Prévie. Teilhard écrit que l’Homme doit découvrir qu’il possède “une volonté de vivre universelle qui converge et s’hominise en lui” (p. 130). Pour lui, l’Homme est “axe et flèche de l’Évolution” (p. 131).

La Matière se nomme Prévie chez Teilhard pour insiste sur le fait que déjà une tendance anime la Matière : un élan vers la Vie. La Prévie se caractérise par trois attributs : la Pluralité (la Matière se décompose sans limite), l’Unité (la Matière est englobée dans un grand tout) et l’Énergie ou capacité d’inter-action qui est l’Étoffe universelle. Le Monde est donc Système par sa multitude (pluralité), Totum (unité) et Quantum (énergie). Teilhard voit la Prévie sous le signe de la durée et celui de l’évolution. La Matière évolue donc, et Teilhard sur la table des éléments part de l’hydrogène jusqu’à l’élément 92. Ces éléments se sont formés à partir de l’hydrogène et il pense que “les astres sont des laboratoires où se poursuit, dans la direction des grosses molécules, l’Évolution de la Matière” (p. 132). Deux lois principales régissent la Matière : la loi de conservation de l’énergie et celle de la dégradation de l’énergie en chaleur (loi d’entropisation). Pour Teilhard le temps joue un rôle essentiel dans l’univers : celui-ci a commencé, il s’use et finira : “un remous montant au sein d’un courant qui descend, telle serait donc la figure du Monde. Ainsi parle la Science. Et je crois à la Science. Mais la Science s’est-elle jamais donnée la peine jusqu’ici de regarder le Monde autrement que par le Dehors des choses ?” (p. 133).

Les choses ont un dedans. L’Homme possède une conscience, les animaux aussi quoique plus rudimentaire, chez les plantes aussi on peut trouver un dedans : Claude Bernard disait qu’elles obéissent à une “idée directrice”, et Richet à parler d’une “intelligence cellulaire”. Aussi pour Teilhard “coextensif à leur Dehors, il y a un Dedans des Choses […]. Dans une perspective cohérente du Monde, la vie suppose inévitablement, et à perte de vue avant elle, de la Prévie […]. Bien observé, […] un phénomène a nécessairement, en vertu de l’unité fondamentale du Monde, une valeur et des racines ubiquistes. […] Réfractée en arrière dans l’Évolution, la Conscience s’étale qualitativement en un spectre de nuances variables dont les termes inférieures se perdent dans la nuit” (pp. 134-135). Pour Corte, ce “panpsychisme” relève de “l’imagination poétique”. Teilhard écrit encore qu’une “conscience est d’autant plus achevée qu’elle double un édifice matérielle plus riche et mieux organisé. […] Perfection spirituelle (ou “centréité” consciente) et synthèse matérielle (ou complexité) ne sont que les deux faces ou parties liées d’un même phénomène” (p. 135). Pour lui toute énergie est de nature psychique mais l’énergie fondamentale se décompose en une “énergie tangentielle” qui rend l’élément solidaire de tous les éléments du même ordre, et une “énergie radiale” qui attire l’élément dans la direction d’un état toujours plus complexe et centré vers l’avant.

Pour Teilhard, la terre est sûrement née d’une chance, elle possédait une certaine quantité de Prévie et a pu franchir un seuil dans l’Évolution pour qu’apparaisse la Vie. Pour expliquer le passage de la Prévie à celui de la Vie, Teilhard prend d’exemple du piston qui reste immobile tant que la pression ne dépasse pas le seuil critique d’un kilogramme, puis se met en mouvement quand le seuil est franchi. Le mouvement du piston n’était que virtuel avant la pression suffisante, après il devient effectif. Pour Teilhard, la Vie commence virtuellement dès la formation de l’atome. Il écrit : “plus aucune limite tranchée entre l’animal et le végétal au niveau des monocellulaires. Et de moins en moins de barrière sûre […] entre le protoplasme “vivant” et les protéines “mortes” au niveau des très gros amas cellulaires” (pp. 138-139). Pour Corte, Teilhard semble donc admettre la génération spontanée.

La Biosphère est la sphère de la vie, elle se superpose à la Barysphère ou Hylosphère, c’est-à-dire la sphère de la Matière. Teilhard suppose que la Vie monte, qu’elle progresse par tâtonnements suivant un “hasard dirigé”. C’est ainsi qu’il interprète l’apparition du système nerveux et la marche vers une plus grande cérébralisation. Avec celle-ci on passe de la Biosphère à la Noosphère, c’est-à-dire de la Vie à la Pensée. Teilhard souhaite se limiter au phénomène, c’est-à-dire aux relations expérimentales entre Conscience et Complexité. Dans cette perspective, il explique que l’énergie “tangentielle” a provoqué par un accroissement infime un retournement de l’énergie “radiale”. L’énergie se serait alors redéployée sur elle-même pour produire la réflexion c’est-à-dire la Pensée. La conscience est C, la Pensée est C2. L’animal possède C, l’Homme possède C2, il est capable de dire et de penser distinctement “Je”. La Personne apparaît donc.

Pour Teilhard, avec l’apparition de la conscience au carré, c’est une nouvelle espèce de Vie qui commence, une seconde espèce. Avec la pensée apparaît aussi la prise de conscience, quelquefois douloureuse, que tout change, comme le signalait déjà Héraclite il y a 2500 ans. Tout est baigné dans l’Évolution, peut-être même les lois de l’univers ! Les vues de Teilhard portent donc sur l’avenir.

7/ Le prophète :

En 1950 Teilhard est élu à l’Académie des sciences.

En plus d’être un scientifique, Teilhard délivre un message : d’abord celui de l’importance primordiale de l’Évolution. Il écrit : “L’onde que nous sentons passer en nous ne s’est pas formée en nous-même. Elle nous arrive de très loin -partie en même temps que la lumière des premières étoiles. Elle nous parvient après avoir tout créé en chemin. L’esprit de recherche et de conquète est l’âme permanente de l’Évolution” (p. 152). Pour Teilhard, “l’Évolution est une montée vers le Conscience. C’est uniquement vers une hyper-réflexion, c’est-à-dire vers une hyper-personnalisation, que la Pensée peut s’extrapoler” (p. 160).

Le devenir tend chez Teilhard vers un point mystérieux, difficilement définissable, le point Oméga. Il écrit, “Notre moi, notre personnalité tout justement ! Plus profond que tous ses rayons, le foyer même de notre conscience : voilà l’essentiel qu’il s’agit pour Oméga de récupérer pour être vraiment Oméga. […] L’Union différencie. […] Et nous voici par le fait même ramenés au problème d’aimer” (p. 161). L’Amour est biologiquement l’affinité de l’être pour l’être, c’est une propriété générale de la Vie. L’Amour parachève l’être, “Seul l’amour, pour la bonne raison que seul il prend et joint les êtres par le fond d’eux-mêmes, est capable d’achever les êtres, en tant qu’êtres, en les réunissant” (p. 162).

Pour l’avenir, Teilhard semble proposer trois tâches pour l’humanité : organiser la recherche, la concentrer sur l’objet humain, enfin lier Science et Foi. Pour lui, l’homme comme objet de connaissance est la clef de toute la science de la Nature. Mais la Science seule est incapable de remplir cette tâche. Teilhard écrit que “ni dans son élan, ni dans ses constructions, la Science ne peut aller aux limites d’elle-même sans se colorer de mystique et se charger de Foi” (p. 169). Le goût du travail scientifique “est suspendu à la conviction, strictement indémontrable à la Science, que l’Univers a un sens, et qu’il peut, ou même qu’il doit aboutir, si nous sommes fidèles, à quelque irréversible perfection. Foi au progrès” (p. 169). Pour lui Science et Foi sont les deux faces de l’acte complet de connaissance.

Bibliographie :

- Corte (Nicolas), La vie et l’âme de Teilhard de Chardin.
- Solt (Bruno), 1992, Les maîtres spirituels et mystiques contemporains, Retz.